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Les jeux de face dans la culture chinoise par le sociolinguiste chinois francophone Zheng Li Hua

mardi 21 février 2006, par le bureau de l’AFI

Un petit groupe d’enseignants de français langue étrangère et de membres du bureau de l’AFI a été reçu à Canton le samedi 11 février dernier, par Monsieur Zheng Li Hua, professeur de sociolinguistique, doyen de la Faculté des Langues et Cultures Européennes et directeur du Centre de Recherches sur l’Interculturel à l’Université des Etudes Etrangères du Guangdong. Nous souhaitons ici, en prolongement de cette rencontre, donner un aperçu de son remarquable travail sociolinguistique sur la notion de face dans la culture chinoise. Voici donc " La face des Chinois à travers des proverbes et dictons ", par Zheng Li Hua, reproduit ici avec l’autorisation de l’auteur.

La face des Chinois à travers des proverbes et dictons

ZHENG LIHUA [1]

1. Introduction

Si quelqu’un subit une atteinte grave contre son honneur ou son prestige, on dit en français qu’il « perd la face ». Pourtant, peu de gens savent que cette expression française, tout comme son équivalent en anglais « lose face » est un emprunt au chinois . La notion de « face » découle en effet directement de la civilisation chinoise. Elle correspond à une forme de contrainte ancrée dans la culture et constitue la charpente de la conduite des Chinois dans leurs relations interpersonnelles ordinaires. Mais qu’est-ce, au fond, que la « face » chinoise ? Malgré sa portée extraordinaire, il est difficile d’en donner une définition précise. Ainsi que le fait remarquer LIN, chercheur chinois : « Le sens de la ‘face’ n’est ni à traduire ni à définir. La face semble relever d’une idée de prestige, ce qui n’est pas tout à fait exact ; elle ne s’achète pas mais confère une réelle splendeur aux individus ; elle est abstraite mais elle constitue quelque chose que les hommes se disputent et pour lequel des femmes meurent ; elle est invisible mais elle existe et s’étale devant le public » (1990). Le caractère insaisissable et mystérieux de la face ne saurait nous faire reculer devant une possible explication. Notre hypothèse, c’est que la face, norme culturelle et sociale fondamentale d’une société, tend à se refléter à la fois dans les comportements humains et les pratiques linguistiques.

2. La face des Chinois

En chinois, deux mots différents distinguent au sens propre la partie du corps qu’est le visage, et au sens figuré, la notion de face : 面 (mian) et 脸 (lian). Selon une étude de H.C. HU, du point de vue étymologique, « mian » est plus ancien que « lian ». Il paraît que « mian » a acquis le sens figuré de face dès le IVe siècle av. J.C. « Lian » est un mot plus récent dont la première attestation remonte, dans le Dictionnaire Kang Xi, à la dynastie des YUAN (1277-1367) (HU, 1944). Dans les langues chinoises contemporaines, pour désigner le « visage », les Chinois du Sud utilisent plutôt « mian », alors que ceux du Nord, plutôt « lian » qui, de plus, est conforme à l’écrit moderne, celui-ci étant basé sur les langues du nord. Les deux mots peuvent s’employer au sens figuré pour parler de la notion de « face », mais se différencient de façon imperceptible : « lian » se réfère plutôt au respect qu’un groupe accorde à un de ses membres riche d’une bonne réputation morale, c’est-à-dire la qualité qu’un individu doit posséder pour être inséré dans la société et qui fait partie intégrante de sa personnalité ; « mian », souvent utilisé avec le suffixe « zi » (面子 : mian zi) se réfère plutôt au prestige social reconnu par une société et qui se manifeste sous forme d’un succès social lié à l’effort et à l’intelligence et constituant l’environnement lumineux de l’homme ; « mian zi », de plus, se réfère au sentiment personnel issu d’une relation sociale. De ce fait, il semble possible de distinguer trois aspects de la face générale : face en tant que « réputation morale », face en tant que « prestige social », et face en tant que « sentiment personnel ». Nous allons examiner ces trois aspects de la face chinoise tels qu’ils se manifestent dans les proverbes et dictons chinois.

2.1. La première face : la réputation morale

1) Ren ren you lian, shu shu you pi (人人有脸, 树树有皮) : chaque personne a une face, comme chaque arbre a une écorce.
Dans la langue chinoise, on trouve toute une série de proverbes qui prennent l’écorce de l’arbre pour objet de comparaison de la face de l’homme :
Ren yao lian, shu yao pi (人要脸, 树要皮) : l’homme veut la face, comme l’arbre veut l’écorce.
Ren huo lian, shu huo pi (人活脸, 树活皮) : l’homme doit avoir une face pour pouvoir vivre, comme l’arbre doit avoir une écorce.
A la lumière de ces expressions, on s’aperçoit que la face est considérée comme devant être naturelle chez l’homme et nécessaire à son existence sociale. Cette face est étroitement liée au concept de nom(ming fen : 名份)dans la culture chinoise. Chacun porte un nom (dans le sens de titre social comme père, mari, professeur, etc.) et chaque nom entraîne certaines obligations sociales. Ce nom, comme le disent deux chercheurs chinois, est comme une peau qui recouvre tout homme à tout moment et dans toute situation, qui lui appartient et le suit comme son ombre. Elle devient alors l’essence même de sa face (LIU et LIN, 1987). La face est donc le symbole du nom que la société attribue et reconnaît à un individu. Elle constitue la dignité qu’il peut et doit avoir, dignité liée à son nom, sans laquelle la vie en société devient impossible. Cette face peut se développer ou se réduire en fonction du statut social des interactants.

2) Ning jiao shen gu ku, bu jiao lian pi re (宁叫身骨苦,不叫脸皮热) : on préfère faire souffrir son corps qu’avoir chaud à la face.
Avoir chaud à la face, c’est sentir qu’on perd la face. La paresse étant objet de mépris, on préfère peiner pour éviter de perdre la face. En Chaozhou, on dit souvent « bo liang su xi » : si l’on n’a pas de face, on préfère mourir.

3) Diu lian (丢脸) : perdre la face.
La société, en même temps qu’elle octroie un nom à un individu, lui fixe des responsabilités et conçoit des attentes de sa part. Celui qui n’agit pas en fonction des attentes sociales et qui viole les conventions s’attire des commentaires ou des critiques et perd la face, ce qui constitue une grave atteinte à sa personnalité et à sa dignité. En effet, le synonyme de « diu lian » est « diu ren » (丢人) qui signifie : perdre la qualité d’homme.
Selon les faces (les noms) de ses membres, la société engendre des attentes différentes. Un même acte peut faire perdre la face à l’un sans la faire perdre à l’autre. Par exemple, quand un cocher s’assoit au bord de la route et enlève sa veste pour chercher ses puces, ce n’est pas grave. Si cela est effectué par une personne de haut statut social, elle perdra la face (LU, 1981). En général, plus le statut de quelqu’un est élevé, plus sa dignité est en jeu, plus fragile est sa face et plus il lui faudra de vigilance pour ne pas la perdre.
Dans l’interaction, chacun a le droit de protéger sa propre face et les autres ont le devoir de respecter l’image que l’autre veut donner de lui. Mais la face chinoise est aussi celle dont parle GOFFMAN : ce n’est qu’un prêt que la société consent à une personne : si elle ne s’en montre pas digne, ce prêt lui sera retiré (GOFFMAN, 1974). On peut donc perdre même le droit à sa face et les autres se débarrassent en même temps de leurs devoirs à l’égard de cette face.
La perte de face est liée à la situation et/ou aux circonstances spatiales. Si l’on commet une action coupable sans être vu ou dans un endroit où l’on n’est pas connu, on a moins le sentiment de perdre la face.
En résumé, d’un côté, la face est le bien le plus précieux de l’individu et son refuge le plus confortable ; de l’autre côté, la face étant une contrainte sociale et psychologique, elle est comme une geôle pour lui.
Respecter la face des autres est une vertu prioritaire pour les Chinois. Ceux qui font perdre la face aux autres perdent eux-mêmes la leur. Un proverbe dit : « Da ren xiu da lian, ma ren xiu jie duan » (打人休打脸,骂人休揭短) : quand vous frappez quelqu’un, il ne faut pas toucher son visage ; quand vous insultez quelqu’un, il ne faut pas toucher son point sensible. C’est-à-dire qu’il ne faut pas porter atteinte à sa face ni la lui faire perdre.
« Perdre la face » peut être causé par un acte volontaire : vol, crime, fraude, adultère, etc., mais aussi par un événement qui échappe à la volonté : une jeune fille violée perd aussi la face.
Si l’on a perdu la face, on n’est plus digne de vivre dans une communauté. Ce qu’on a de mieux à faire, c’est de changer de lieu de travail ou de domicile, d’aller là où l’on n’est pas connu, pas plus que n’est connue « l’affaire de perte de face » (diu lian zhi shi : 丢脸之事).

4) Mei lian jian ren (没脸见人) : ne pas avoir de face pour se présenter devant quelqu’un.
Ce « quelqu’un » est souvent le groupe d’appartenance ou bien quelqu’un d’un rang supérieur. Une fois la face perdue, il est naturel qu’on n’ait plus la face nécessaire pour pouvoir se présenter devant ses amis, sa famille, son directeur, etc. C’est donc plutôt la sanction psychologique de la face qui fonctionne. Parfois, cette sanction intérieure agit de façon plus intense que la sanction extérieure. Une jeune fille déshonorée sent qu’elle n’a plus de face devant les autres. A l’extrême, cela peut la pousser au suicide. Dans les disputes, une des armes couramment usitées est d’imposer à son adversaire cette sorte de sanction psychologique : « Tu as encore la face de te montrer aux autres, toi ? » (Ni hai you lian jian ren ma, ni ? 你还有脸见人吗,你 ?). Un père peut dire à son fils qui a commis des fautes hors de la maison : « Comment, tu as encore la face de venir me voir ? » (Zen me, ni hai you lian lai jian wo ? 怎么, 你还有脸来见我 ?).

5) Bu yao lian (不要脸) : ne pas vouloir la face.
Si « diu lian » (丢脸 : perdre la face) peut être le résultat de l’ignorance, de la négligence ou encore d’un manque d’expérience, « ne pas vouloir la face » provient tout à fait de la volonté de l’individu. Celui qui ne veut pas la face n’a pas peur de la perdre. Il est prêt à affronter l’opinion publique. Sur lui, la sanction sociale de la face perd tout son effet. Comme dit le proverbe : « A qui ne veut pas la face, la loi ne peut rien faire » (Ren bu yao lian, wang fa nan zhi. 人不要脸, 王法难治). Cette personne est considérée comme dangereuse pour la société, car elle ne respecte plus les règles du jeu social et les autres ne peuvent plus prévoir ses actes.
« Ne pas vouloir la face » est donc beaucoup plus grave que « perdre la face ». C’est souvent une véritable injure pour l’autre. Si cette personne va encore plus loin, elle « n’aura ni peau ni face » (mei pi mei lian : 没皮没脸). C’est la pire des condamnations : elle a perdu jusqu’au sentiment de face et n’a donc plus conscience des conventions sociales.

6) Lian pi hou (脸皮厚) : avoir une peau épaisse sur la face.
L’expression a un peu la même signification que « ne pas vouloir la face » (bu yao lian), mais sa gravité est moindre : la personne a une face et veut la face. Seulement, cette face est recouverte d’une peau épaisse que l’opinion des autres a du mal à pénétrer. Dans le cas contraire, c’est « lian pi bao » (脸皮薄) : avoir une peau mince sur la face, c’est-à-dire que le sujet en question est particulièrement sensible à sa réputation.
La société préfère « les peaux minces » aux « peaux épaisses », car sur ces dernières, le contrôle social perd de son efficacité. Pourtant, avec une peau trop mince, une personne est trop sensible au moindre commentaire et cela exige plus d’égards, de la part des autres, qu’elle n’en mérite et elle connaîtra forcément des difficultés dans sa vie sociale. Les « peaux épaisses », au contraire, profitent souvent des « peaux minces » comme l’exprime le dicton : « Lian pi bao chi bu zhao, lian pi hou zhi ge gou » (脸皮薄吃不着, 脸皮厚吃个够) : les « peaux minces » ne mangent rien, les « peaux épaisses » mangent à leur faim.

7) Gei...diu lian (给 ... 丢脸) : faire perdre la face à quelqu’un.
Puisque, dans la culture chinoise, il y a du « moi » dans le « toi » et du « toi » dans le « moi », si tu perds la face, tu feras perdre la mienne en même temps. Si le jugement catégorique et la généralisation sont des capacités naturelles et communes de la pensée humaine (ALLPORT, dans HEWSTONE et GILES, 1986), les Chinois les poussent plus loin encore avec leur esprit de lien de sang. Il y a une série de proverbes qui expriment cette tournure d’esprit :

« Lao zi ying xiong er hao han » (老子英雄儿好汉) : A père héros, fils héros (tel père, tel fils).
« Lao shu de er zi hui da dong » (老鼠的儿子会打洞) : Le fils du rat sait faire des trous.
« Gou shou zhu ren xiu » (狗瘦主人羞) : Quand le chien est maigre, son maître est honteux.

Quand une personne perd la face, tous ceux qui sont en relation avec elle sont atteints dans leur réputation : sa famille, son village, le groupe social auquel il appartient, et même tout le pays.
« Ne nous fais pas perdre la face » est une expression couramment utilisée par les parents envers leurs enfants pour que ces derniers se comportent bien dans la société, car lorsqu’un individu est en faute, la critique porte non seulement sur lui, mais aussi sur sa parenté et sur tous les responsables de son éducation (son professeur, son directeur, etc.). Comme dit le dicton : « Yang bu jiao, fu zhi guo ; jiao bu yan, shi zhi duo » (养不教, 父之过 ; 教不严, 师之惰) : élever sans éduquer, c’est la faute du père, éduquer sans sévérité, c’est la paresse du maître. Les injures chinoises portent rarement sur la personne qu’on veut insulter, mais plutôt sur ses parents, surtout sur sa mère. Une des injures les plus méchantes est de dire : « Tu es mal élevé ». L’expression « Ne nous fais pas perdre la face » peut donc avoir deux effets : d’un côté, elle inculque chez l’enfant le concept de lien avec les autres, le sens de la face et la conscience de responsabilité collective dans ses actions ; d’autre part, ceux qui l’entourent surveillent ses actions afin de ne pas être compromis eux-mêmes. Les autres peuvent ressentir le fait de perdre la face quand la personne en question n’en a pas conscience ou ne veut pas l’avoir, d’où les expressions : « Tu ne perds pas la face, mais nous, nous la perdons » (Ni bu diu lian, wo men diu lian 你不丢脸,我们丢脸) ; « Moi, ton père, je perds la face à cause de toi » (Wo zuo fu qin de dou wei ni diu lian 我作父亲的都为你丢脸). Ces expressions ont pour but d’éveiller le sentiment de face. Devant une décision à prendre, les Chinois doivent se demander non seulement « Qu’en diront les autres ? » mais aussi : « Cela fera-t-il perdre la face aux miens ? »

Les analyses ci-dessus nous montrent que la « face » en tant que réputation morale constitue une qualité indispensable pour survivre dans un contexte chinois. Fondée sur le nom que la société attribue et reconnaît à un individu, elle fonctionne à la fois comme sanction sociale et comme sanction psychologique.

2.2. La deuxième face : le prestige social

1) Ai mian zi (爱面子) : aimer la face.
De même que « 要脸 » (yao lian : vouloir la face) dans le proverbe « Tout homme veut la face, comme tout arbre veut l’écorce » (Ren ren yao lian, shu shu yao pi 人人要脸,树树要皮) est une attitude considérée comme un fait naturel et un besoin, le désir de prestige social est lui aussi considéré comme un élan naturel. « Ren ren dou ai mian zi » (人人都爱面子 : Chacun aime la face) correspond à une vérité. Un dicton exprime bien cette idée : « Shui you zhi fen bu wang lian shang ca ? » (谁有脂粉不往脸上擦 : Qui ne se met pas de rouge sur la face ?). Cela veut dire : si l’on a le moyen d’agir de façon à gagner de la face, on le fait ; si l’action est déjà réalisée, on le manifeste auprès des autres. Si une personne pousse cette démarche trop loin, on dit qu’elle « aime trop la face » (tai ai mian zi 太爱面子).

2) You mian zi (有面子) : avoir de la face.
Cela se dit d’une personne qui bénéficie d’un solide prestige social. Plus le statut de quelqu’un dans la société est élevé, plus il possède de la face. La logique chinoise veut que, si l’on a des liens avec une personne bénéficiaire d’une face considérable, l’on devient aussi quelqu’un qui a de la face.

3) Zheng mian zi (争面子) : gagner de la face.
La face est comme une médaille d’or que tout le monde se dispute. Chacun essaie de faire mieux, de dépasser les autres pour attirer l’opinion favorable du public et acquérir de la face.
La personne qui gagne de la face montre son assurance et sa confiance en elle-même en gardant la tête haute devant les autres. Sa joie peut se lire sur son visage. On dit dans ce cas qu’elle « a de l’or sur la face » (lian shang fei jin : 脸上飞金) ou qu’elle « a de la lumière sur la face » (lian shang sheng hui : 脸上生辉) ou qu’elle « a une face bonne à voir » (lian shang hao kan : 脸上好看).

4) Yao mian zi (要面子) : demander de la face.
La personne qui demande de la face essaie de donner la preuve, en dépit d’une réalité contraire, qu’elle est meilleure que les autres, qu’elle a meilleur caractère, une meilleure position et de meilleures capacités. Si « aimer la face » est naturel chez l’homme, « demander de la face » est un abus que la société rejette. Si la société tolère les conflits relevant de la conscience de face, elle condamne ceux qui exagèrent, surtout ceux qui s’approprient la face par des moyens malhonnêtes. Un dicton dit : « Gao zhuang bu de lian, dao da er shi bang » (告状不得脸, 倒打二十棒 : en accusant les autres sans réussir à gagner de la face, on s’attire vingt coups sur les fesses). On ridiculise ainsi ceux qui échouent dans leur tentative d’atteindre un prestige social en nuisant aux autres et qui perdent eux-mêmes la face. Un autre dicton énonce : « Lu duo da lian, xian duo da yan » (露多大脸,现多大眼 : autant de face gagnée, autant de face perdue). Cela veut dire que ceux qui ont extirpé la face de façon malhonnête la perdront tôt ou tard. Et ce qu’ils perdront, c’est leur dignité humaine et leur qualité d’acteur social. C’est la raison pour laquelle une autre expression dit : « Ning ke dang zhong chu chou, bu wang lian shang tie jin » (宁可当众出丑, 不往脸上贴金) : on préfère se donner en spectacle que de mettre de l’or sur la face.
Chaque personne a un nom qui correspond à un certain degré de prestige social. Or, le nom peut changer en fonction de la position sociale. Si la position sociale réelle d’une personne se situe à un niveau plus bas que celui qui correspond à son nom, et si elle veut malgré tout maintenir le prestige que comporte ce nom, on dira qu’elle « demande obstinément de la face » (si yao mian zi : 死要面子. Le mot « 死 » signifie « mort ». Cela semble dire : même mort, on demande encore de la face).

5) Zuo mian zi (作面子) : faire la face.
Les Chinois aiment faire la face, cela apparaît dès qu’ils se font prendre en photo : mettre de beaux vêtements, être bien coiffés, prendre une jolie pose et bien sourire. On dit des gens qui, pour la face, veulent accomplir des actes dépassant de loin leurs possibilités, qu’ils « arrangent le devant de la porte » (bai men mian : 摆门面) ou « soutiennent la scène » (cheng chang mian : 撑场面). Un dicton révélateur exprime aussi cette idée : « da zhong lian chong pang zi » (打肿脸充胖子) : frapper sa propre face pour se grossir. On peut imaginer : un maigre qui se frappe la face jusqu’à ce qu’elle enfle et dit : « Me voilà, je suis gros ». On utilise ce dicton pour se moquer des gens qui « font la face » au-delà de leurs capacités.

6) Diu mian zi (丢面子) : perdre la face.
Le sens de cette expression se rapproche de « diu lian » (丢脸), à cette différence près que, dans « diu mian zi », ce qu’on perd, c’est surtout du prestige social, alors que dans « diu lian », il s’agit surtout de la dignité. « Diu lian » sous-entend une atteinte à la morale alors qu’on peut « diu mian zi » seulement à cause d’une négligence, d’un faux pas, ou d’une circonstance défavorable. Par exemple, un sportif qui perd une compétition se sent « diu mian zi », et non « diu lian ». Mais une fois qu’on « diu lian », on « diu mian zi » automatiquement. On voit ainsi que la face en tant que support de prestige social, se trouve incluse dans l’extension de la face en tant que dignité humaine.
Contrairement à « la face lumineuse » et à « la face d’or », quand on gagne de la face, on « n’a pas de lumière sur la face » (lian shang wu guang : 脸上无光) ou bien l’on « a une face mauvaise à voir » (lian shang nan kan : 脸上难看) quand on perd la face.
La notion de perte de face (de prestige social) est liée aussi à une idée de pouvoir. En fonction des positions sociales différentes occupées par les acteurs, un même acte peut faire perdre la face à l’un sans avoir le même effet pour l’autre. « Plus la face qu’entend garder un interactant a d’importance, plus grand est le risque de la voir en désaccord avec la réalité et, en conséquence, plus urgente est la nécessité d’y parer » (GOFFMAN, 1974).
Toute interaction sociale met en cause à la fois la face de l’un des partenaires et celle de l’autre. « L’effet combiné des règles d’amour-propre et de considération est que, dans les rencontres, chacun tend à se conduire de façon à garder aussi bien sa propre face que celle des autres participants... Il semble que cette sorte d’acceptation mutuelle soit un trait structurel fondamental de l’interaction, et particulièrement des interactions à l’œuvre dans les conversations face à face » (GOFFMAN, 1974).
Gagner la face ou la perdre n’est pas seulement une affaire personnelle. En effet, si on accomplit un acte glorieux, on doit le montrer à toutes ses relations. Les Chinois qui réussissent à l’étranger (les Chinois de Paris, par exemple) aiment retourner dans leur pays natal ou dans celui de leurs parents en Chine afin de pouvoir faire état de leurs succès devant ceux qui ont un lien de sang avec eux. Ainsi, ils gagnent de la face non seulement pour eux-mêmes, mais aussi pour leurs parents et leurs ancêtres. En effet, un des devoirs de piété filiale consiste à gagner de la face pour les parents, à « gagner de la gloire pour les ancêtres » (guang zong yao zu : 光宗耀祖) et à « rendre la porte de la famille lumineuse » (men di sheng hui : 门第生辉). Quand une personne gagne de la face, tous ceux qui ont un lien avec elle partagent cette face. Les gens du Hunan sont fiers que MAO Zedong soit né dans leur région. Mais quand une personne perd la face, les autres la perdent aussi. Souvent même, ils se montrent furieux d’avoir un lien quelconque avec elle et essaient de le nier à tout prix.

7) Gei mian zi (给面子) : donner de la face.
Dans la culture chinoise centrée sur des relations interpersonnelles, la face de l’autre vaut autant, pour un individu, que la sienne propre. Les préoccupations prioritaires, dans tout échange, sont donc de penser avant tout à la face de l’autre et de n’être pas la cause de sa perte éventuelle. Il faut au contraire chercher à tout moment à donner de la face. De plus, l’importance de la face donnée est proportionnelle au statut de celui qui la donne.
La face se mesure également par l’écart existant entre l’attente de A et l’acte effectué par B. S’il s’agit d’un acte que A n’aurait pu espérer, c’est lui « donner une grande face » (gei le hao da de mian zi : 给了好大的面子). Si l’acte de B n’est pas satisfaisant pour A, c’est « donner soit disant une petite face » (suan shi gei le dian mian zi : 算是给了点面子). A peut taquiner B en disant : « Pouvez-vous me donner un peu de face ? » « Comment, cette petite face, vous ne pouvez pas me la donner ? ». Cette façon de s’exprimer revient aussi à donner de la face à B, car être en mesure de donner de la face aux autres signifie qu’on a qualité pour le faire.

Si la face en tant que réputation morale est une entité plutôt abstraite, la face en tant que prestige social est une entité plus concrète, ce dont témoignent les verbes de sens concret qui l’actualisent : elle est comme un objet qu’on peut « avoir », « donner », « gagner », « perdre », « faire », « demander », « refuser », etc.

2.3. La troisième face : le sentiment personnel

1) Yu...you mian zi (与 ... 有面子) : avoir de la face avec quelqu’un.
Il est naturel qu’un contact engagé avec d’autres individus amène une relation personnelle avec eux. La particularité d’une relation personnelle chez les Chinois, c’est qu’elle est basée sur la face, qu’elle se voit contrôlée et soutenue par elle. Deux amis ont de la face l’un aux yeux de l’autre. La dimension de leur face dépend du pouvoir de chacun et du degré de leur amitié. Une même personne peut avoir « une grande face » avec l’un, mais « une petite face » avec un autre. Dans ce sens, cette troisième face est étroitement liée à la deuxième : si une personne jouit d’un prestige social élevé, tout son entourage l’écoute et lui confère une importante considération personnelle.
Pour obtenir la considération personnelle de quelqu’un, il est nécessaire d’établir avec lui, en premier lieu, une relation de face visant à le faire devenir l’un des « siens ». C’est de cette façon que chacun des partenaires pourra ultérieurement se définir l’un par rapport à l’autre et avec précision. C’est ce qu’on appelle « attirer une relation » (la guan xi : 拉关系).

2) Ren qing zhai (人情债) : la dette de face.
« 人情债 » se traduit littéralement par « dette de sentiment personnel ». Les Chinois placent « le sentiment » au-dessus de « la raison », étant donné que la dernière est abstraite, relevant de l’activité logique, alors que le premier est lié concrètement au contact social. Ils insistent ainsi sur la communication du cœur, c’est-à-dire sur l’échange de sentiments. Le proverbe dit : « Ren qing yi ba ju , ni bu lai wo bu qu » (人情一把锯,你不来我不去) : la face est comme une scie, si vous ne venez pas, je ne vais pas. Le confucianisme dit aussi : « Qing lai, li bu wang, fei li ye » (情来,礼不往,非礼也) : vous recevez la face et vous ne la rendez pas, ce n’est pas poli. En donnant de la face à son interlocuteur, on espère recevoir une récompense en retour.
Il s’agit d’un échange social, unité concrète mais fondamentale de la communication au quotidien. Lorsqu’on reçoit de la face, on doit payer. D’abord, il faut payer sur place en remerciant la personne, puis payer par la suite en lui rendant de la face à une occasion ou à une autre. Cette « dette de face » réclame impérativement un paiement, ce qui est illustré par le proverbe suivant : « Ren qing ji si zhai, tou ding guo er mai » (人情急似债,头顶锅儿卖) : le sentiment personnel presse comme la dette, on doit tout vendre (pour la payer).
Donc, en demandant et en recevant de la face, on risque d’être accablé par le poids d’une dette. Il vaut donc mieux essayer de ne pas demander de face pour éviter cette situation.

3) Jie mian zi (借面子) : emprunter la face.
Selon les relations personnelles existant entre eux et le statut social de chacun, A peut avoir une grande face aux yeux de B alors que C n’a qu’une petite face à ses yeux. Lorsque C veut demander quelque chose à B, il lui faut « emprunter la face » à A.
Le fait d’ « emprunter la face » joue un rôle majeur dans la vie sociale des Chinois. A, B, et C forment ce qu’on appelle un « réseau de relations » (guan xi wang : 关系网). Il s’agit là en fait d’ « un réseau de faces ». « Passer par la porte derrière » (zou hou men : 走后门) est en réalité « passer par la face ». La loi perd de son efficacité devant la face et, comme disent les proverbes : « La relation personnelle est plus puissante que la loi » (Jiao qing da yu wang fa 交情大于王法), « Un compatriote vaut mieux que trois tampons » (Yi ge lao xiang, ding guo san ge gong zhang : 一个老乡,顶过三个公章). Il arrive qu’on se trouve vraiment dans une impasse si l’on n’a pas de face ou si l’on ne trouve pas de face à emprunter. LIN considère la face comme un obstacle pour la démocratie. Il dit : « Aussi longtemps que tous n’abandonneront pas leur face, la Chine ne deviendra pas un vrai pays démocratique. Le peuple, de toute façon, n’a pas une grande face. La question est ‘quand les mandarins accepteront-ils d’abandonner leur face ?’. Nous ne circulerons en sécurité dans la rue que lorsque la face en aura disparu ; nous n’aurons des jugements justes que le jour où il n’y aura plus de face au tribunal ; nous n’aurons une authentique république qu’à condition qu’il n’y ait plus de face entre les ministères et que le gouvernement de face puisse céder la place à un gouvernement de loi » (LIN, 1990).

4) Kan zai ...... de mian zi shang (看在 ... 的面子上) : prendre en considération la face de quelqu’un.
De même que C peut emprunter la face à A pour demander quelque chose à B, ce dernier doit tenir compte de la face de A dans son comportement envers C. Il va lui accorder une faveur ou s’abstenir de le punir. Comme le disent les proverbes : « Bu kan seng mian kan fo mian » (不看僧面看佛面) : si vous ne considérez pas la face du moine, considérez celle du bouddha. Cela se dit quand on demande à quelqu’un de tenir compte de la face d’une personne plus importante. « Da gou kan zhu ren mian » (打狗看主人面) : avant de battre un chien, on doit tenir compte de la face de son maître. C’est-à-dire que si l’on veut punir quelqu’un, il faut d’abord savoir qui sont ses parents, qui est son patron, etc. S’il s’agit d’une personne de grande face, mieux vaut s’abstenir.
Voici quelques autres expressions particulièrement courantes :
« Kan wo de lao lian, bang ta zhe yi hui ba » (看我的老脸,帮他这一回吧) : considérez ma vieille face et donnez-lui un coup de main.
« Kan wo de bao mian, yuan liang ta zhe yi ci ba » (看我的薄面,原谅他这一次吧) : Considérez ma mince face et pardonnez-lui pour cette fois.
En demandant à B de considérer sa face, A donne de la face à B, car il se trouve dans la position de demander une aide à B.
« Prendre en considération la face de quelqu’un » présuppose que ce quelqu’un a une face importante. Si une personne simple dit « Considérez ma face », elle risque de se faire répliquer : « Quelle face tu as ? ».
Nous voyons dans les expressions et les exemples ci-dessus que si B tient compte de la face de A dans son comportement envers C, c’est parce que A est de statut supérieur ou en relation étroite avec lui. En un mot, A est important aux yeux de B.

5) Si po mian zi (撕破面子) : déchirer la face.
La face constituant le tissu des relations sociales, déchirer la face, c’est rompre ces relations. Dans l’interaction sociale, on se voit obligé de préserver la face des autres en adoucissant un acte menaçant ou même en s’abstenant de l’accomplir pour éviter une rupture. Quand un ami vous demande un service qui vous gêne, vous devez le lui rendre, car « il est difficile de refuser la face d’un ami » (Peng you de mian zi nan que : 朋友的面子难却) ou « vous ne pouvez pas franchir la face » (mian zi shang guo bu qu : 面子上过不去) ; si quelqu’un ne cesse de vous supplier de faire quelque chose, vous cédez, car vous avez « une face molle » (lian ruan : 脸软) qui ne résiste pas aux supplications ; quand vous voulez critiquer quelqu’un, vous hésitez, car vous « n’arrivez pas à faire tomber la face » (mo bu xia lian lai : 抹不下脸来) ; quand vous êtes vraiment en colère contre un ami, vous vous résignez, car vous ne voulez pas « déchirer la face » entre vous. Dans les relations sociales, en effet, le pire, c’est de « déchirer la face ». Si l’on dit : « ils se sont déchiré la face », cela signifie que leurs relations sont rompues.

On voit que la face en tant que sentiment personnel est un signe de l’établissement, du maintien ou de la rupture d’une relation interpersonnelle. Elle sanctionne les comportements des participants de cette relation.

3. Conclusion

Nous avons examiné le concept de face dans la culture chinoise en nous fondant sur des proverbes et dictons. Il nous semble pourtant difficile d’en donner une définition exacte. GOFFMAN la définit comme étant « la valeur sociale positive qu’une personne revendique effectivement à travers la ligne d’action que les autres supposent qu’elle a adoptée au cours d’un contact particulier » (GOFFMAN, 1974). Cette définition est juste, mais abstraite. Elle se réfère plutôt à une universalité. Comme la notion de face est sujette à des spécificités culturelles et qu’elle est liée aux valeurs fondamentales d’une culture (BROWN et LEVINSON, 1987), il nous semble plus utile de résumer les particularités de la face chinoise que de nous hasarder dans une définition qui serait nécessairement peu précise :

1) La face chinoise est certes une valeur sociale positive, mais c’est une valeur que la société reconnaît à un individu en fonction de son « nom » (sa place) défini par une relation sociale calquée sur des paramètres familiaux (être père ou fils, etc.). La notion de « nom » est primordiale dans ce concept de face. Déterminée par le « nom », la face n’est pas tout à fait un libre choix de son détenteur. Elle est en lui et malgré lui. Elle est variable en fonction du « nom », des contextes et des interactants.

2) La face chinoise est à la fois individuelle et collective. Elle rejaillit sur tous les partenaires d’une relation. On peut gagner ou perdre de la face pour les autres, grâce aux autres ou à cause des autres.

3) La face chinoise fonctionne à la fois comme un contrôle social et comme une sanction psychologique. Non seulement elle constitue le moteur d’une interaction sociale, mais aussi elle fait partie de la structure psychologique d’un Chinois. Elément essentiel de la culture, elle participe à l’organisation de l’individu en tant qu’être social et culturel et influence directement sa façon de penser et d’agir.

4) La face chinoise est à la fois abstraite et concrète. Elle est invisible, mais elle agit partout où des sujets sont en contact. Nous avons vu que la plupart des verbes introduisant les expressions concernant la face sont de sens concret : « avoir, demander, aimer, perdre, donner, offrir, rendre, emprunter, acheter, faire, déchirer, refuser », etc.

5) La face chinoise présente essentiellement trois aspects : un aspect moral, un aspect social et un aspect interactionnel, qui correspondent aux trois définitions expliquées ci-dessus : la dignité humaine, le prestige social et le sentiment personnel. Ces trois aspects de la face sont étroitement corrélatifs, mais ils agissent à des degrés divers suivant les circonstances de l’interaction sociale : la première face en constitue le fondement et sans elle un sujet perd jusqu’à sa qualité d’interactant ; la deuxième est le contenu ou l’objectif de l’interaction, ce qui engendre la recherche d’une approbation de la part de l’autre, sinon son admiration ; la troisième, c’est le fil conducteur de l’interaction, de sorte que si ce fil est rompu, cela entraîne une rupture de l’échange et même de la relation elle-même.

6) L’idée de pouvoir est le moteur du concept de face. En un certain sens, le pouvoir est l’équivalent de la face elle-même et les rapports interpersonnels qu’elle provoque correspondent à des rapports de force.

La notion de face doit être universelle, car malgré leurs différences culturelles, les hommes sont partout semblables. Pourtant, il nous semble intéressant d’examiner certaines différences culturelles se manifestant dans les jeux de face. Les peuples peuvent différer profondément tant dans leur perception de la notion de la face que dans leur façon d’en réaliser la valeur. L’étude des conflits de face au cours de l’interaction entre les uns et les autres nous permettra de mieux comprendre les écarts existant entre les cultures.


[1Des livres de zheng Li Hua sur la notion de face sont disponibles : en France chez L’Harmattan, Les Chinois de Paris et leurs jeux de face, 1995. En Chine (en français), Language et communication, Introduction à la sociolinguistique interactionniste, 2003. Zheng Li Hua organise aussi à Canton tous les deux ans le séminaire interculturel sino-français, regroupant des chercheurs de divers horizons (universitaires, entrepreneurs).

Messages

  • Super intéressant d’autant plus que c’est quelque chose de très étrange pour moi. J’ai beaucoup apprécié cette lecture.
    Une chose qui m’a frappée c’est l’histoire de l’épaisseur de la peau de la face. La peau est rattachée à l’élément métal et à l’entité psychique du p’o (désolée, je ne peux pas faire l’idéogramme à l’ordi) qui détermine entre autre la base structurelle de l’individu, la limite entre sa propre personne et l’extérieur et serait aussi la force agissante de nos ancêtres en nous (selon Jean-Marc Eyssalet qui a en général de très bonnes références). Ceci ajoute l’aspect énergétique ou physiologique à la chose ce qui m’a bien amusée.

    Toujours est-il que la complexité de tous ces jeux a de quoi rajouter à l’expression : c’est du chinois !

    Personnellement, je me retrouve davantage dans une culture comme celle des Amérindiens où rien ne fonctionnait comme ça chez eux, ce qui sans doute les a conduits à leur perte devant les manipulations des nouveaux arrivants !

    Les Amérindiens, tout en ayant un sens de la communauté très puissant, font les choses pour le bien de tous dans un esprit de respect pour toute vie et ne sont habituellement austracisés que dans des cas extrêmement graves, irrécupérables, et menaçants pour le bien-être de la communauté. Mais au départ, tout est libre. Dans des cas de difficultés personnelles, ils sont plutôt invités à faire des rituels de purification et de guérison, car un coeur en paix ne peut être mauvais. L’aspect spirituel est partie intégrante de leur quotidien. Le mode relationnel traditionnel est un modèle d’auto-gestion et d’auto-évaluation, de responsabilisation et de transparence, d’entraide et de prospérité mutuelle sans favoritisme ni injonctions.

    Bien sûr, la réalité actuelle est toute autre mais ces valeurs sont encore palpables à bien des égards dans les communautés autochtones et je dirais même parfois sur le territoire canadien.